Y a-t-il une recette gagnante pour maximiser la rentabilité d’une ferme laitière?

On a souvent tendance à vouloir trouver LE secret du succès ou LA meilleure stratégie entre toutes pour réussir.  C’est vrai en amour, dans le sport et en affaires. En agriculture, différentes écoles de pensées se confrontent dans les conversations entre producteurs, notamment sur les réseaux sociaux. D’aucuns préconisent le contrôle serré des dépenses et un coût de production minimum. D’autres visent davantage les performances techniques du troupeau. Parfois même, on semble attribuer la réussite à une marque ou à une couleur! Un seul modèle de gestion peut-il garantir une meilleure rentabilité?

Je vous propose de jeter un coup d’œil au plus récent Northeast Dairy Farm Summary, publié à chaque année par l’organisme Farm Credit East (FCE).  C’est très intéressant d’observer comment se débrouillent les fermes des états du nord-est américain, où le climat est assez semblable au nôtre, mais dont le système de mise en marché est très différent.

Quel est le style de gestion des fermes les plus rentables?

Dans son rapport de 2019, FCE présente, entre autres, les données économiques et techniques des entreprises les plus performantes (groupe des 25 % supérieurs), selon cinq différents styles de gestion. Serait-ce donc qu’il n’y a pas qu’une seule recette gagnante pour réussir?

En effet, parmi les 67 producteurs au sommet du palmarès des gestionnaires, on a reconnu cinq styles principaux basés sur une caractéristique prédominante :

  1. Le performant avec les vaches (lait/vache)
  2. Le mordu de l’efficacité du travail (lait/travailleur)
  3. Le vigilant sur les marchés (prix du lait)
  4. L’économe (gestion serrée des dépenses)
  5. L’équilibré (bon dans tout)

Le tableau suivant reprend les données de la figure 15 présentée dans l’étude mais ramène le tout sur les unités qu’on utilise ici afin de faciliter les comparaisons. La productivité des vaches est exprimée en kg de lait, la production par travailleur en hl/UTP et les résultats financiers transposés en dollars canadiens.

Adaptation du tableau 15 du 2019 Northeast Dairy Farm Summary

La gestion avant la taille du troupeau!

Autre fait intéressant à souligner, des troupeaux de toutes les tailles se trouvent parmi les plus rentables.  Pourtant un autre tableau de la même étude nous montre que les troupeaux de grande taille affichent un meilleur revenu net par vache après retrait des propriétaires.  Quelle interprétation pouvons-nous en tirer?  Cela signifie simplement que, même si elles ne profitent pas toutes des économies associées aux gros troupeaux, certaines fermes parviennent à dégager une marge financière intéressante.  

Quel est donc le secret d’une meilleure rentabilité?

En observant les caractéristiques de ces fermes du top 25 %, on peut se poser des questions et tenter de cerner l’élément-clé qui ferait toute la différence.  

  • Est-ce que le troupeau moyen de 79 vaches rapportant individuellement 887 $/an est préférable à celui de 289 vaches rapportant 709 $/vache/an?
  • Est-ce un gros avantage d’afficher un coût de production bas si une part importante des économies s’explique par la rémunération de la main-d’œuvre familiale?
  • Un taux de rendement élevé sur le capital est-il plus important qu’un bon prix pour son lait? 
  •  …?

On pourrait débattre longuement de chacune de ces questions et bien d’autres, mais en bout de ligne, il n’en demeure pas moins que toutes ces fermes affichent une rentabilité supérieure à la moyenne. Et si elles y arrivent, c’est certainement parce qu’en dépit d’un style de gestion prédominant pour chacune, les chefs de ces entreprises se préoccupent aussi de tous les autres aspects de gestion. Par exemple :

  • Le compte de banque n’est pas un « bar ouvert » chez les « performants avec les vaches »;
  • Le mordu de l’efficacité du travail ne se laisse jamais passer un prix sous la moyenne;
  • L’économe se préoccupe aussi de la productivité de son troupeau en affichant près de 11 000 kg/vache.  Pourvu que l’argent soit bien dépensé!

Finalement, ce qui est essentiel de retenir c’est que chaque profil de gestion a des forces desquelles chacun peut s’inspirer et adapter à sa propre entreprise pour continuer à en améliorer la rentabilité.  Autrement dit, à chaque entreprise ses objectifs et sa recette pour les atteindre, mais dans un but commun de rentabilité.

Et cette rentabilité, on la recherche pour réaliser ses rêves et apprécier son statut de producteur laitier.  N’est-ce pas là le secret de la réussite?

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Par René Roy, agr.
Conférencier et auteur, René est agroéconomiste au sein de l’équipe innovation et développement de Lactanet depuis 2007 et a collaboré au développement de plusieurs formations pratiques, notamment Produire du lait et faire de l’argent et Nées pour faire de l’argent.