Nouvelle condition génétique et nouveaux haplotypes : faiblesse musculaire et BH14

L’industrie laitière a tiré d’importants bénéfices de la génomique, et les progrès réalisés vont des améliorations génétiques rapides pour pratiquement tous les caractères à l’identification et à la gestion de conditions génétiques et d’haplotypes indésirables. La plus récente découverte porte sur le syndrome de faiblesse musculaire précoce affectant la race Holstein et l’haplotype BH14 affectant la fertilité dans la race Suisse brune. Depuis avril 2024, Lactanet publie les résultats des tests génétiques de la faiblesse musculaire (MW) ainsi que les valeurs de probabilité d’être porteur de l’haplotype de faiblesse musculaire (HMW) et de BH14.

Qu’est-ce que la faiblesse musculaire précoce?

Le syndrome de faiblesse musculaire précoce (MW) est caractérisé par une incapacité chez les veaux de se tenir debout à la naissance ou par la perte de cette capacité peu après la naissance. La condition se présente avec différents niveaux de gravité et certains veaux affectés sont en mesure de se rétablir. La plupart des veaux ne survivent toutefois pas au-delà de l’âge de six semaines. Le plus récent porteur connu de cette condition génétique est Southwind Bell of Bar-Lee, né en 1984. Ses descendants, Roylane Socra Robust-ET, né en 2008, et Seagull-Bay Supersire, né en 2010, ont grandement contribué à la propagation du gène MW dans la race Holstein.

Test génétique de la faiblesse musculaire

Des chercheurs de l’Université d’État de la Pennsylvanie ont effectué plusieurs analyses auprès de veaux affectés et non affectés pour déterminer l’origine génétique de la condition de faiblesse musculaire et ont identifié une mutation dans le gène CACNA1S sur le chromosome 16 qui était commune chez les veaux affectés. Ce gène est connu pour produire des canaux calciques dans le muscle squelettique et des mutations ont été signalées comme entraînant une paralysie musculaire chez les humains. Cette condition est de nature récessive, ce qui signifie que seuls les veaux ayant hérité du gène indésirable de leurs deux parents sont affectés. Ce n’est toutefois pas aussi simple que cela. Comme une pénétrance incomplète se produit, seul un très petit nombre d’animaux avec deux copies du gène négatif peut survivre jusqu’à l’âge adulte.

Sur la base de cette information, un test génétique a été développé et est largement utilisé par les compagnies d’IA pour identifier les taureaux qui sont porteurs ou exempts du gène indésirable. Environ 14 000 résultats de tests génétiques ont été partagés avec Lactanet et sont maintenant affichés sur notre site web avec d’autres codes de conditions génétiques. Les mêmes résultats de tests génétiques ont aussi été partagés avec Holstein Canada. Les résultats des tests génétiques de la faiblesse musculaire sont affichés avec les codes suivants :

  • MWF = testé non porteur (exempt)
  • MWC = testé porteur (hétérozygote, une copie)
  • MWS = testé véritable porteur (homozygote, deux copies)

Valeurs de probabilité d’être porteurs

Dans le cas des animaux qui n’ont pas de résultat de test génétique, un résultat d’haplotype peut être utilisé pour identifier le statut de porteurs des animaux génotypés dans la race Holstein. En même temps que la publication des évaluations génétiques de décembre 2023 aux États-Unis, le Council on Dairy Cattle Breeding (CDCB) a présenté et publié ses résultats d’haplotypes internes de MW, sous la forme abrégée de HMW.

Pour illustrer la probabilité qu’un animal soit porteur de HMW, Lactanet calcule une valeur de probabilité d’être porteur de chaque animal dans sa base de données en se basant sur les résultats des tests génétiques connus, les résultats des haplotypes reçus de CDCB et les données généalogiques. Comme toutes les probabilités d’être porteur, elles sont présentées sous forme de valeurs qui vont de 1 %, signifiant que l’animal est probablement exempt de l’haplotype, à 99 % signifiant que l’animal est probablement un porteur. Pour la plupart des animaux génotypés, des valeurs de 1 % et de 99 % sont affichées alors que les valeurs entre les deux (p. ex. 50 %, 25 %, etc.) sont affichées pour les animaux qui ne sont pas génotypés ou dont le résultat d’haplotype n’est pas disponible, et un astérisque (*) est affiché à côté de l’identifiant au début de la ligne. Il est aussi possible qu’un astérisque simple (*) ou double (**) soit affiché après les valeurs de probabilité d’être porteur de l’haplotype associé à une déficience en cholestérol (HCD) et du nouvel haplotype HMW. Un seul astérisque indique que l’animal a une possibilité d’être affecté par le gène indésirable alors qu’un double astérisque indique qu’on s’attend très probablement à ce que l’animal soit affecté. Le statut HMW de tous les animaux se retrouve sur le site web de Lactanet au moyen de l’outil de recherche d’un animal. Une fois que vous avez trouvé l’animal qui vous intéresse, vous pouvez aller à sa page de « Sommaire d’évaluation génétique » et y trouver une boîte contextuelle avec les valeurs de probabilité d’être porteur de HMW ainsi que de toutes les conditions génétiques et haplotypes connus dans la race. Autrement, vous pouvez naviguer vers la page « Généalogie » pour accéder aux valeurs de probabilité d’être porteur de l’animal ainsi que de ses parents et grands-parents.

En analysant les données disponibles pour la faiblesse musculaire, Lactanet a estimé la fréquence des porteurs dans la population Holstein nord-américaine et a découvert des différences entre des femelles nées au Canada par rapport aux États-Unis (Figure 1). La fréquence estimée des porteuses de HMW dans la population Holstein américaine a constamment augmenté depuis 2012, dépassant 11 % chez les femelles nées en 2018, et est demeurée plutôt stable au cours des dernières années. Par contre, la fréquence estimée des porteuses de HMW dans la population Holstein canadienne a atteint un sommet d’environ 6 % chez les femelles nées en 2022. La principale raison de cette différence est le fait que la semence de Roylane Socra Robust-ET n’était pas admissible à l’importation au Canada alors qu’elle a été grandement utilisée aux États-Unis.

Figure 1 : Fréquence estimée des porteuses de HMW chez les femelles Holstein nord-américaines

Haplotype BH14 affectant la fertilité dans la race Suisse brune

Comme c’est le cas pour HMW, les valeurs de probabilité d’être porteur sont publiées pour l’haplotype BH14 dans la race Suisse brune. D’abord signalé en Suisse en 2022, l’haplotype BH14 entraîne une perte de gestation précoce et remonte à Ventures Esp Babaray, né en 1978, comme étant le plus ancien porteur connu. Lors de la publication des évaluations génétiques d’avril 2023 aux États-Unis, le CDCB a commencé à communiquer les résultats de BH14 que Lactanet utilise maintenant pour publier les probabilités d’être porteur. Comme d’autres valeurs de probabilité d’être porteur, celles de BH14 varient de 1 % à 99 % et indiquent la probabilité qu’un animal soit un porteur du gène indésirable. La Figure 2 indique la tendance de la probabilité moyenne estimée d’être porteur des deux haplotypes de la race Suisse brune, notamment BH14 ainsi que BH2, qui entraînent une perte embryonnaire précoce ou une mortinatalité. La fréquence moyenne des porteuses de BH14 a fluctué au cours des dernières années, mais se situe à presque 9 % chez les femelles canadiennes nées en 2023. Jusqu’à maintenant, les éleveurs de race Suisse brune ont efficacement diminué la fréquence de BH2 et devraient utiliser la même approche pour continuer à réduire cette tendance ainsi que celle de BH14.

Figure 2 : Tendance du pourcentage de porteuses d’haplotypes affectant la fertilité chez les femelles canadiennes de race Suisse brune

Gestion de MW et de BH14

Maintenant que MW chez les Holstein et BH14 dans la race Suisse brune sont connus et signalés, des stratégies de l’industrie peuvent être utilisées pour réduire la probabilité que des animaux porteurs soient utilisés ensemble et pour réduire efficacement la fréquence des gènes indésirables responsables dans la population de leurs races respectives. Lactanet publie maintenant les résultats des tests génétiques de MW et les valeurs de probabilité d’être porteur de HMW et de BH14 pour aider à la prise de décisions d’accouplement. Dans le cas de MW, la plupart des troupeaux canadiens ont une faible fréquence de porteuses, mais certains troupeaux ont une fréquence jusqu’à 40 % et doivent diligemment examiner les résultats. Les femelles porteuses ne causent pas directement de problème dans la population. Toutefois, si ces femelles porteuses sont utilisées avec un taureau porteur, 25 % des gestations ou de la progéniture seront alors affectées. Il est important de surveiller de près les valeurs de probabilité d’être porteur avant de prendre des décisions d’accouplement pour réduire efficacement la fréquence dans votre troupeau et dans la race.

Le site web de Lactanet est une excellente ressource pour aider à gérer les conditions génétiques et les haplotypes connus indésirables et à prendre de meilleures décisions d’accouplement. Une boîte contextuelle a récemment été ajoutée au sommaire d’évaluation génétique, au calculateur de consanguinité et aux pages de généalogie de chaque animal pour permettre de voir ses valeurs de probabilité d’être porteur des conditions génétiques et des haplotypes principaux. Le calculateur de consanguinité contient aussi de nouveaux visuels pour aider les producteurs à identifier des accouplements potentiels qui risquent de produire une gestation ou un veau affecté par ces gènes indésirables. Ensemble, les membres de l’industrie laitière peuvent continuer à identifier et à gérer les gènes indésirables afin d’améliorer la reproduction, la santé et le bien-être des troupeaux, ce qui se traduit par une rentabilité accrue.

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Par Hannah Sweett, Ph. D.
Hannah a découvert sa passion pour l'agriculture pendant ses études de premier cycle à l'Université de Guelph et grâce à son expérience professionnelle dans l'industrie laitière. Elle est titulaire d'un B.Sc. en biologie moléculaire et génétique ainsi qu’un doctorat en génétique animale axé sur l'amélioration génétique de la fertilité des bovins laitiers.
Par Allison Fleming Ph. D.