Enjeu des mycotoxines chez les bovins

Quelles sont les sources de contamination?

Dans les fermes laitières et bovines, on peut trouver des moisissures dans plusieurs types d’aliments :

  • les céréales telles que le maïs, le blé, l’orge, l’avoine
  • divers sous-produits céréaliers (Drêche de distillerie)
  • les ensilages d’herbe ou de maïs et le foin.

Figure 3. Présence de moisissures sur une grosse balle d’ensilage dont l’emballage a été percé par des oiseaux. 

Crédit photo : Oswald Merz

La contamination et la production de mycotoxines peut survenir au champ, pendant la récolte et lors de l’entreposage. Les conditions pluvieuses et l’humidité augmentent le risque de contamination et favorisent le développement des moisissures.

L’application de certaines mesures préventives permet de limiter l’étendue de la contamination des aliments et ainsi de réduire le risque d’effets indésirables chez les animaux.

Quelles sont les mycotoxines les plus courantes chez les bovins?

La présence des mycotoxines dans les aliments du bétail est fréquente et répandue partout à travers le monde. Dans une étude à grande échelle, dont les données d’analyse provenaient de 100 pays sur tous les continents, 88% de tous les échantillons d’ingrédients et d’aliments pour les animaux étaient contaminés par au moins un type de mycotoxine (Gruber-Dorninger et coll., 2019).

À ce jour, plus de 400 mycotoxines différentes sont documentées. On les regroupe selon le type de moisissures à l’origine de leur production. Les principales mycotoxines associées à des problèmes chez les bovins sont produites par les espèces de champignons du genre Gibberella (figure 4). Chacune se distingue par sa composition chimique.

Figure 4. Mycotoxines associées à des problèmes chez les bovins

*Bien que produite par Fusarium et associée à des effets indésirables, l’acide fusarique n’est pas une mycotoxine à proprement dite.

L’aflatoxine

L’aflatoxine n’est pas présente dans les aliments produits au Québec/Canada, mais il est possible d’en trouver dans les aliments qu’on importe des États-Unis ou autre endroit ou climat est plus chaud. On se méfie particulièrement de cette toxine puisqu’elle peut être excrétée dans le lait des vaches intoxiquées et qu’elle est associée à des problèmes de santé importants chez les humains.

Des mycotoxines différentes selon le climat et l’endroit

Principalement à cause des différences climatiques, le portrait des mycotoxines trouvées dans les aliments diffère d’une région à l’autre. À l’échelle nord-américaine, les trois mycotoxines les plus détectées dans plus de 5000 échantillons d’aliments pour le bétail, analysés entre 2007 et 2018, étaient des produits des moisissures de Fusarium (figure 5):

  1. le déoxynivalenol (DON) et ses dérivés,
  2. la fumonisine (FUM),
  3. la zéaralénone (ZÉA).

On pourrait présumer d’un portrait relativement similaire dans les aliments des bovins du Québec/Canada, mais en l’absence de données probantes, on ne peut l’affirmer. D’autant plus, le portrait des mycotoxines varie non seulement d’une région à l’autre et selon la météo, il varie aussi d’une année à l’autre et entre les variétés d’une même espèce de plante.

Rappelons-nous également qu’il existe des centaines de mycotoxines, mais seulement quelques-unes d’entre elles sont analysées de routine dans les tests en laboratoire. Le portrait de la prévalence réelle de chaque mycotoxine dans les aliments n’est donc pas précisément connu.

Figure 5. Pourcentage d’échantillons positifs aux principales mycotoxines dans des aliments pour le bétail en Amérique du Nord (n = 5 471, 2007-2018).

Gruber-Dorninger et Coll. (2019)

Les aliments peuvent-ils être contaminés par plusieurs mycotoxines différentes?

Puisque les cultures peuvent être infestées par plusieurs différentes souches de moisissures, et que chacune peut produire différentes toxines, la co-contamination des aliments est fréquente. Dans l’étude de Gruber-Dorninger et coll. (2019), 64% des échantillons positifs étaient contaminés par au moins deux types de mycotoxines. Sans surprise, les combinaisons de mycotoxines en co-contamination les plus fréquentes impliquaient les trois plus prévalentes : le DON, la ZÉA et la FUM.

À titre d’exemple, la figure 6 illustre la proportion des échantillons de maïs contaminés par l’une ou l’autre des combinaisons de deux mycotoxines les plus fréquentes (Gruber-Dorninger et coll., 2019). Les co-contaminations surviennent également dans les autres types d’aliments.

Lorsque plusieurs aliments contaminés sont mélangés ensemble, le risque de co-contamination est évidemment augmenté.

Figure 6. Combinaisons les plus fréquentes de deux mycotoxines en co-contamination dans le maïs (n = 74 821)

Gruber-Dorninger et Coll. (2019)

Étant donné la forte probabilité de co-contamination dans les aliments des bovins, la qualité de l’échantillonnage et le choix du type d’analyse jouent un rôle déterminant sur la représentativité des résultats d’analyse par rapport à la situation réelle.

Quels sont les effets des mycotoxines chez les bovins?

Les signes de mycotoxicose chez les bovins sont variés et peu spécifiques, c’est-à-dire qu’on peut aussi les attribuer à d’autres problèmes de santé. Il n’est donc pas possible de relier un symptôme particulier à l’ingestion d’aliments contaminés. En outre, le risque d’observer des effets chez les bovins intoxiqués dépend 1) de la santé immunitaire de la vache et/ou du troupeau, 2) du ou des types de mycotoxine en cause et 3) de la concentration des mycotoxines dans l’alimentation.

Les vaches avec un bon système immunitaire résistent mieux

Chaque vache et chaque troupeau répond différemment à l’ingestion de mycotoxines, en fonction des facteurs liés à l’immunité. L’application de bonnes pratiques pour limiter le stress chez les vaches, un programme d’alimentation adéquat et le suivi régulier de la santé du troupeau favorisent la santé du système immunitaire et diminuent les risques d’observer les effets indésirables.

Les effets diffèrent selon les mycotoxines

De manière générale, l’ingestion de mycotoxines peut affecter l’efficacité du système immunitaire de l’animal et le rendre plus sensible aux différentes infections et maladies. On les associe souvent aussi à des problèmes de reproduction et à une diminution des performances de production laitière. Toutefois, certains signes cliniques sont plus spécifiquement attribuables à une ou certaines mycotoxines (figure 7).

Figure 7. Signes cliniques associés aux principales mycotoxines chez les bovins.

Si chaque mycotoxine peut être associée à des effets typiques à partir d’une certaine dose ingérée, il n’est plus possible de s’y fier vraiment lorsque plusieurs types de mycotoxines sont présentes ensemble. Bien que peu documentés, les mycotoxines peuvent engendrer des effets additifs, synergiques ou antagonistes entre elles. Cela justifie l’intérêt de choisir une méthode d’analyse des aliments complète permettant de mesurer plusieurs types de mycotoxines au lieu d’un seul.

Ce projet est financé par l’entremise du programme Innov’Action agroalimentaire, en vertu du Partenariat canadien pour l’agriculture, entente conclue entre les gouvernements du Canada et du Québec.

 
 

Partager

Par Younès Chorfi, Maxime Leduc et Julie Baillargeon