Portrait de la Ferme Yves R. Couture : La coupe qui fait toute la différence
- 24 mai 2021
Depuis l’automne 2020, les composantes du troupeau de la Ferme Yves R. Couture sont en déclin peu à peu. À l’aide de PROFILab, on teste des solutions au niveau de l’alimentation, mais rien n’est concluant. Quelques temps plus tard, nous avons commencé à s’interroger sur les fourrages de la RPM. Nous avons comparé les anciennes rations et avons fait des constats. Voici le résumé d’une histoire qui finit bien.
Propriétaires : Gilles Couture et Annie Benjamin
Relève : Julien et Lili-Rose Couture
Située à Ham-Sud
Composition du troupeau : 55 vaches Holstein
Stabulation : Libre, robotisée sur compost
Alimentation : RPM + aliments robot
Au cours des dernières années, les propriétaires de la ferme Yves R. Couture ont fait un changement dans leur style de production. En 2018, ils ont décidé de faire le saut en robotique. Leur but ? Offrir un meilleur confort à leurs animaux, car leur ancienne étable était à un point tournant : On arrête ou on continu.
Le plan initial était de garder la même alimentation que dans le passé avec des balles rondes et des grains. L’entreprise a débuté son alimentation robotisée avec 2 aliments servis dans le robot avec la possibilité d’un troisième. Peu de temps après le transfert, le 3e aliment a pris sa place dans l’alimentation au robot. L’incorporation d’ensilage de maïs a aussi été ajouté peu de temps avant le transfert en traite robotisée. Ne possédant qu’un 18X70 comme structure d’entreposage pour son ensilage de maïs, les quantités dans la ration ne pouvaient pas être trop élevées. L’ensilage de mais se limite à 8 kg en hiver et 15-20 kg en été (structure entreposage et bonne reprise en été). Ceci permet d’optimiser les chances de garder une bonne qualité d’ensilage en été, tout en ayant assez de tonnage pour nourrir le troupeau durant toute l’année. La ration est composée d’ensilage d’herbe sous forme de balles rondes, de maïs, de grains (orge), de tourteau de soya et de minéral. L’ajout de maïs grain est fait lorsque nécessaire.
Donc que s’est-il passé à la ferme?
À l’automne 2020, on commence à observer une baisse au niveau des composantes du lait. Cette baisse arrive à un moment de l’année où celles-ci devraient reprendre du « peps » à la suite de l’été qui vient de se terminer. Inversement, les composantes avaient connu une hausse entre les mois de juillet et octobre. Des variations similaires avaient déjà été observées dans le passé à des moments anormaux.
Des pistes comme le triage avaient déjà été mis sur la table, mais nous étions loin de se douter que la situation était à ce point problématique…
Démonstration de triage dans une RTM
Le triage peut se démontrer par des cercles que les vaches font dans la RTM ou RPM. Elles cherchent à manger les fines particules de grains avant l’ensilage. Elle ne se doutent pas immédiatement qu’en faisant cela, il peut y avoir des répercussions importantes sur la santé de leur rumen.
La première étape est alors de refaire des tests Pennstate sur le hachage des balles rondes dans le mélangeur. Avant toute chose, un mélangeur est fait pour mélanger et non pour hacher. Donc, il y a des facteurs de risque qu’il faut prendre en considération en hachant ses ensilages dans un mélangeur :
- Quand le mélangeur est vide, valider l’état des couteaux. Si on est capable de passer facilement une corde de balle sur les couteaux sans que celle-ci ne se coupe, c’est qu’il est temps d’aiguiser les couteaux du mélangeur Idéalement, amenez déjà vos fourrages en « full rotocut » pour réduire le temps de hachage et la facture d’électricité;
- Valider le temps de brassage réel pour hacher ses fourrages. On peut être parfois surpris entre un temps estimé et le temps réel.
De retour à la ferme Yves R. Couture
Lors des prises de données à la ferme, le temps de mélange des balles rondes seules observé a été de 26 minutes. Théoriquement, lors de l’utilisation du Pennstate, nous aimerions avoir moins de fibre sur le premier tamis (entre 10 et 20%) que sur le 2e, car cette fibre sera triée par les vaches. Le 2e tamis, qui comporte notre fibre la plus importante, devrait contenir (en poids) le plus de particules d’ensilage (45 % à 75%) tandis que le 3e tamis devrait être entre 10 % et 20 % et le 4e à moins de 20%, car ce sont ces particules qui tapissent le rumen sans le faire travailler.
Voici les résultats des 4 tamis du Pennstate de la ferme après les 26 minutes de brassage :
Particules restantes (% du total) |
73 15 2 11 |
À ma grande surprise, je me doutais qu’il y avait du triage, mais en voyant ces résultats, je fus estomaqué. Nous avions déjà fait des tests dans le passé et ce n’était pas à ce point problématique.
Le poids des balles rondes et la matière sèche de celles-ci ont aussi un impact sur la facilité du fourrage à se hacher dans le mélangeur. Une seule balle ronde sèche avec des couteaux mal aiguisés peut donner un résultat assez décevant, même après un temps de mélange assez élevé. Une balle ronde sèche déposée en premier avec une balle ronde humide sur le dessus aide à mettre du poids sur la plus légère des deux et fait une pression sur les couteaux. Advenant que les balles rondes sont trop sèches, la première étape à faire est de s’assurer que les couteaux sont bien aiguisés. Ensuite, au lieu d’ajouter de l’eau à la fin du mélange, l’ajouter au départ pour tenter de mettre plus de poids et ce, dès le début du brassage. Cette stratégie rendra le fourrage moins léger. C’est ce que nous avons fait.
Nous avons par la suite réalisé plusieurs tests à 26, 30, 35, 40, 45 et 51 minutes de brassage. Voici les obtenus à 45 (gauche) et 51 minutes (droite) de brassage :
Particules restantes (% du total) |
45 34 3 19 |
Particules restantes (% du total) |
32 27 3 38 |
Selon les résultats obtenus, nous avons donc décidé de rester à 45 minutes de brassage, étant donné que nous perdions trop de fibre au 2e tamis en montant à 51 minutes. Les résultats de la RPM finale était beaucoup mieux qu’initialement. Nous avons également mélangé l’ensilage de maïs à la fin pour ne pas la hacher plus qu’elle ne l’est déjà. Finalement, nous avons noté que le facteur important était de mettre le temps de brassage adéquat sur les balles rondes.
**Ne pas oublier que les balles rondes se feront hachées quand même lors de l’incorporation des grains et d’ensilage de maïs au mélange.
Retour sur les facteurs importants à valider en RTM/RPM
Des tests Pennstate, tamis à fumier et tamis à grain ont toujours été importants, mais le sont encore plus présentement alors que chaque producteur jongle avec le prix des aliments qui grimpent sans arrêt. Chaque petit test peut mener à un meilleur résultat :
- Hachage des ensilages : viser ½ po ensilage de foin et ¾ po ensilage maïs;
- Hachage de la RTM ou RPM finale : est-ce qu’on brise nos ensilages plus qu’il ne le faut vs leur état de départ ?
- Temps de brassage
- Humidité de la ration
- Uniformité de la ration avec les grains et minéraux
- Triage : granulométrie des grains
- État des couteaux : nécessite ou non de mettre des couteaux dans certains cas sans balles rondes ou carrées à hacher
Tout est bien qui finit bien
Aujourd’hui, les vaches de la ferme Yves R. Couture ont retrouvé une constance dans leurs composantes et ce, depuis janvier. Maintenant, le gras se maintient entre 4,20 et 4,25 kg/hl la plupart du temps versus 3.95 à 4.05 kg/hl avant nos tests. Pour la protéine, elle a augmenté pour se situer entre 3.20 et 3.30 kg/hl versus 3.10 à 3.15 kg/hl avant les ajustements dans l’alimentation. Le tout pour un lait égal ou supérieur.
Depuis le 21 janvier, nos indicateurs PROFILab montrent présentement que la santé ruminale va mieux (acides gras de novo) et les composantes en sont le résultat.
PROFILab : Composantes (gras et protéine)
PROFILab: Préformés, mixtes et de novo
Dans une polémique sur les gras de type palmitique, ce genre de situation vient remettre un sourire sur le visage des producteurs, car pour les mêmes intrants alimentaires, un peu plus d’électricité et le même lait, il y a plus d’argent dans leur poche.
Ce projet est financé par l’entremise du programme Innov’Action agroalimentaire, en vertu du Partenariat canadien pour l’agriculture, entente conclue entre les gouvernements du Canada et du Québec.