Stocks limités d’aliments protéiques : quelles sont nos options?

Le secteur de l’alimentation animale éprouve actuellement des difficultés en ce qui concerne l’approvisionnement en protéines. Depuis le mois de mai, la grève chez Viterra complique déjà l’approvisionnement en tourteau de soya pour l’Est du Canada, et maintenant le conflit de travail dans le domaine des chemins de fer (CN et CPKC) accentue cette problématique. Face à cette situation exceptionnelle, que peut-on faire pour minimiser les conséquences sur la ferme?

1. Travailler en étroite collaboration avec son conseiller en alimentation et ses fournisseurs

Afin de minimiser les conséquences d’un changement de la ration sur la performance des animaux et les coûts d’alimentation, demandez conseil à vos intervenants. Ils pourront évaluer avec vous les meilleures stratégies à utiliser dans votre situation.

2. Surveiller le niveau d’urée du lait

Un changement dans la ration au niveau de la quantité ou du type de protéines a le potentiel de modifier l’équilibre azote/énergie dans le rumen. Surveillez l’urée du lait pour voir comment vos animaux réagissent, et ajustez la ration en conséquence. Afin d’optimiser la performance des animaux et l’efficacité d’utilisation de l’azote, visez un niveau d’urée se situant entre 8 et 12 mg N/dl.

3. Optimiser les fourrages dans la ration

Les fourrages représentent l’une des principales sources de protéines dans l’alimentation. Vérifiez auprès de votre conseiller s’il est possible d’inclure une plus grande proportion de fourrages dans la ration.

Vérifiez également si c’est possible d’utiliser temporairement un lot de fourrages plus riche en protéines brutes. Si vous utilisez l’ensilage de maïs, vérifiez s’il est envisageable de remplacer une partie de cet ensilage par de l’ensilage d’herbe.

N’oubliez pas de surveiller l’impact de votre stratégie sur vos inventaires de fourrages.

4. Évaluer la régie de la mangeoire

Avec l’aide de votre conseiller en alimentation, assurez-vous que la régie de la mangeoire permet de limiter le gaspillage d’aliments, tout en optimisant l’ingestion des animaux.

5. Remplacer une partie de la protéine dégradable par de l’urée

Il est possible de remplacer une certaine partie de la protéine dégradable au rumen par des produits contenant de l’urée, incluant l’urée à libération lente. Vérifiez auprès de votre conseiller en alimentation si c’est possible dans votre situation.

En trop grande quantité, l’urée dans la ration peut diminuer la consommation de matière sèche, et même être toxique pour les animaux. Il est important de respecter les recommandations suivantes pour les vaches :

  • Utilisez l’urée dans un supplément pour une répartition uniforme ;
    • Respectez toujours les contraintes des meuneries pour éviter que le supplément ne reste pris dans le camion/silo ;
  • Vérifiez les autres sources d’urée dans la ration, certains produits commerciaux en contiennent déjà ;
  • Idéalement, combinez avec une source de glucides rapidement fermentescibles;
  • Respectez tous les maximums suivants pour l’urée totale de la ration des vaches;
    • 1 % des concentrés ;
    • 135 g/vache/jour ;
    • 20 % des protéines brutes totales en provenance de l’urée, incluant les autres sources d’azote non protéique ajoutées ;
  • Pour les sujets de remplacement, ne dépassez pas 0,3 à 0,7 % de la consommation totale de matière sèche.

6. Optimiser la production de protéines microbiennes dans le rumen

Les microbes à l’intérieur du rumen ont la capacité de créer des protéines de haute qualité à partir de l’énergie fermentescible (fibres digestibles, amidon, sucres, etc.) et de l’azote dégradable au rumen. Avec l’aide de votre conseiller en alimentation, optimisez l’apport en énergie fermentescible tout en ayant suffisamment d’azote dégradable. Voici quelques éléments à considérer :

  • Vérifiez si la mouture des grains est optimale;
  • Assurez-vous d’avoir suffisamment de soufre, un élément essentiel pour les microbes du rumen;
  • Considérez l’utilisation de produits contenant du sucre ou des fibres solubles : ceux-ci peuvent fournir de l’énergie aux microbes tout en ayant un effet beaucoup plus limité sur le pH que l’amidon fermentescible;
  • Attention de ne pas causer d’acidose ruminale, ce qui nuirait à la production de protéines microbiennes.

7. Évaluer la possibilité de créer davantage de groupes d’alimentation

La répartition des animaux en plusieurs groupes d’alimentation permet de faire des rations qui répondent plus précisément à leurs besoins. Cela peut se traduire par une diminution des achats d’aliments protéiques. Évaluez cette possibilité avec l’aide de votre conseiller en alimentation.

8. Vérifier la disponibilité de sources alternatives de protéines

Informez-vous auprès de votre conseiller en alimentation s’il est possible d’utiliser une source alternative de protéines pour vos ingrédients ou vos suppléments. Dans un premier temps, évaluez si des sources de protéines sont produites à la ferme, et si vous avez les installations nécessaires pour les entreposer, puis les utiliser dans la ration. Vérifiez également auprès de vos fournisseurs si des sources alternatives sont disponibles. Il est toutefois possible que l’approvisionnement de plusieurs de ces sources soit perturbé par les grèves. Voici quelques exemples de sources de protéines alternatives :

  • Tourteau de canola (approvisionnement déjà limité)
  • Fin gluten de maïs
  • Gros gluten de maïs
  • Fève de soya traitée
  • Produit de soya traité pour en diminuer la dégradabilité ruminale
  • Drêches de distillerie
  • Drêches de brasseries
  • Fèverole
  • Pois
  • Sous-produits animaux
  • Etc.

9. Explorer la possibilité d’équilibrer la ration pour les acides aminés

Les acides aminés sont les constituants des protéines digérées par les animaux. Avec une ration équilibrée pour les acides aminés, une diminution de la teneur en protéine est envisageable, et ce, sans diminuer la performance des vaches.

Il est possible d’utiliser des acides aminés protégés de la dégradation ruminale pour fournir directement aux vaches les nutriments dont elles ont besoin.

Les deux acides aminés essentiels les plus importants sont la méthionine et la lysine. Consultez votre conseiller en alimentation, et assurez-vous de toujours combler les besoins en protéines dégradables pour les microbes du rumen.

10. Diminuer la teneur en protéines de la ration de certains groupes d’animaux

Si une diminution de la teneur en protéines de la ration est inévitable, baissez la protéine pour les animaux en fin ou en milieu de lactation. Si possible, maintenez un niveau suffisant de protéines pour les vaches taries, les vaches en période de transition, et celles en début de lactation.

Pour les sujets de remplacement, les possibilités de diminution de la teneur en protéines sont assez limitées étant donnés leurs besoins importants pour la croissance et la gestation. Il faut plutôt travailler avec des sources d’azote alternatives (urée, fourrages, etc.).

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Par Lactanet