Combien de temps les vaches attendent-elles pour être traites dans  un système de traitées automatisée à circulation libre? 

Lorsqu’il est question de longues périodes en position debout, ce sont souvent les vaches qui restent dans une aire d’attente avant d’accéder à la salle de traite qui nous viennent à l’esprit. D’un autre côté, nous avons tendance à présumer que, dans les systèmes de traite automatisée (STA), les vaches attendent peu, voire pas du tout, avant d’être traites, car elles ont la liberté de choisir le moment où elles souhaitent accéder au robot de traite, sans quitter leur enclos. Mais que ce soit dans une salle de traite ou un STA, nous savons que de longues périodes passées en position debout nuisent à la santé et au confort des vaches, puisqu’elles augmentent leur risque de développer une boiterie et des lésions aux onglons. 

 Nous avons étudié le comportement des vaches au moment de la traite dans un STA à circulation libre. Pour ce faire, nous avons mené une étude d’observation dans le cadre de laquelle nous avons utilisé l’analyse vidéo pour observer, sur une période de 2 jours, 40 vaches d’un troupeau commercial logé dans une étable à circulation libre équipée d’un STA (figure 1). Nous cherchions à savoir combien de temps les vaches attendaient pour être traites; quels facteurs influençaient le temps d’attente; et quels choix faisaient les vaches lorsqu’elles ne parvenaient pas à accéder au robot de traite. 

 Le troupeau à l’étude était logé dans une étable dotée de 3 robots et regroupait 180 vaches Holstein en lactation qui produisaient en moyenne 95 lb de lait par vache et par jour sur une période de 6 mois. L’enclos à l’étude contenait un groupe de 59 vaches de diverses parités, et le robot de traite à circulation libre était installé sur le côté de l’étable, parallèlement à l’enclos. Il y avait un parc d’attente qui restait ouvert toute la journée afin que les vaches puissent y entrer volontairement, mais qui était fermé 3 fois par jour au moment où il fallait aller chercher des vaches pour les amener dans le parc. L’enclos avait une configuration à 3 rangées avec 60 logettes sur litière profonde de sable et des allées en béton. 

Combien de temps les vaches attendent-elles pour être traites?

En moyenne, les vaches se rendaient au robot pour attendre d’être traites 6 fois par jour et attendaient 15 minutes par visite, pour un temps d’attente total de 1 heure et 30 minutes par jour. Ce temps d’attente quotidien était plus court que celui rapporté chez les troupeaux traditionnels avec salle de traite, mais étonnamment, le temps d’attente variait considérablement d’une vache à l’autre. Certaines vaches étaient très efficaces et n’attendaient que 5 minutes par jour pour être traites, tandis que d’autres passaient plus de 5 heures par jour à attendre! 

Quelles étaient les différences entre les vaches ayant un temps d’attente quotidien court et celles qui en avaient un long?

La parité, les jours de lactation et la combinaison de ces deux facteurs avaient un impact sur le temps d’attente quotidien (figure 2). En début de lactation, les vaches de première parité allaient plus souvent et plus longtemps dans l’aire d’attente, ce qui entraînait des temps d’attente plus longs (environ 2 heures/jour). Mais en fin de lactation, leur comportement se rapprochait progressivement de celui des vaches plus âgées : leurs visites étaient moins fréquentes et moins longues dans l’aire d’attente, ce qui se traduisait par des temps d’attente plus courts (environ 1 heure/jour). La compétition et l’inexpérience jouaient probablement un rôle dans le long temps d’attente observé chez les vaches de première parité en début de lactation. Elles devaient souvent rivaliser avec des vaches matures à l’entrée du robot, tout en surmontant la difficulté d’apprendre à utiliser le robot. 

 Un autre facteur ayant eu un impact sur le temps d’attente quotidien était lié à l’utilisation volontaire et répétée du parc d’attente tout au long de la journée pour accéder au robot. En effet, les vaches qui avaient adopté ce comportement présentaient en moyenne des temps d’attente plus longs de 40 minutes et faisaient moins de visites dans l’aire d’attente que celles qui entraient rarement dans le parc d’attente. Même parmi les vaches de première parité, celles qui utilisaient le parc d’attente volontairement et de façon répétée attendaient en moyenne environ 1 heure de plus par jour que celles qui n’adoptaient pas ce comportement. 

Si vous ne réussissez pas du premier coup, essayez, puis essayez encore

Si les vaches ne sont pas traites au moment où elles le souhaitent, la circulation libre leur permet de choisir entre plusieurs autres activités telles que se coucher, boire ou manger. Alors, quels choix ont faits les vaches lorsqu’elles ne parvenaient pas à accéder au robot? La plupart du temps, elles choisissaient de s’éloigner du robot et de continuer à rester debout et inactives dans l’allée ou une logette, à l’affût d’une occasion de se faire traire. À mesure que le temps passait, dans environ 25 % des cas, les vaches se déplaçaient vers la mangeoire ou un abreuvoir, mais il était beaucoup plus probable qu’elles restent debout dans l’allée ou dans une logette, ou encore qu’elles retournent dans l’aire d’attente. Cela suggère que le désir d’être traite continue d’influencer les décisions comportementales après une tentative infructueuse d’accès au robot. 

Plus les vaches attendent pour être traites, moins elles ont de temps pour se reposer

En moyenne, les vaches passaient 10 heures et 50 minutes par jour en position couchée, mais cette durée variait grandement, à savoir de 5 à 16 heures par jour. Les vaches dont le temps d’attente était long (plus de 2 heures par jour) avaient tendance à passer en moyenne 1 heure et 40 minutes par jour de moins en position couchée que celles dont le temps d’attente était plus court (moins de 2 heures par jour). 

Il existe des moyens d’atténuer le comportement de compétition en misant sur la gestion et la conception

  • Bonne conception de l’entrée dans le robot : Les vaches qui utilisaient volontairement le parc d’attente avaient tendance à attendre plus longtemps parce qu’elles étaient désavantagées par rapport à celles qui se trouvaient à l’extérieur du parc d’attente pour accéder au robot. Les vaches dans l’aire d’attente principale exerçaient une pression sur celles qui attendaient dans le parc d’attente en se frayant un chemin à l’extrémité de la barrière pivotante. Cette compétition pour « être la vache la plus forte à la barrière pivotante » pourrait être atténuée en installant à l’entrée du robot des barrières pour protéger le cou et les épaules de la vache suivante dans la file (figure 3). Une telle conception découragerait les vaches dominantes de déplacer les vaches subordonnées en limitant leur interaction à l’arrière de la vache en attente.

     

  • Zone de sortie du robot : Après la traite, certaines vaches qui sortaient du robot déplaçaient les vaches qui étaient en file pour accéder au robot. Ce déplacement était parfois clairement une interaction agressive de la part des vaches dominantes, mais il était parfois dû au manque d’espace dans la zone du robot pendant les périodes de haute fréquentation du robot (« bouchons de circulation »). Une configuration du STA où les vaches sortent loin de l’entrée du robot et ne peuvent pas interférer avec les vaches qui attendent pour y entrer pourrait prévenir ce comportement. 
  • Densité animale : Maintenir un taux de charge (vaches par robot) adéquat pourrait atténuer l’effet de dominance, diminuer le temps passé debout et réduire l’impact des tentatives infructueuses d’accès au robot. 

     

  • Stratégies de regroupement : Adopter des stratégies de regroupement pour réduire les comportements de compétition, en particulier envers les vaches primipares, et entraîner les génisses à l’utilisation du robot avant le vêlage pourraient contribuer à réduire les temps d’attente. 

FIGURES

Figure 1. Lors de l’analyse vidéo, une aire d’attente pour la traite (représentée par les lignes pointillées jaunes) a été délimitée afin de simuler un parc d’engagement ou d’attente à proximité de l’unité de traite. Cette aire d’attente d’environ 49 m2 (530 pi2) incluait l’espace à l’avant du robot de traite et à l’avant du parc d’attente. Le temps passé dans l’aire d’attente correspondait au temps entre l’entrée et la sortie de l’aire d’attente de chaque vache, qu’elle ait été traite ou non.
Figure 2. Temps d’attente quotidien (minutes) par parité et par stade de lactation.
Figure 3. Exemple de conception de barrière d’entrée du robot qui protège le cou et les épaules de la vache suivante dans la file et décourage les comportements agonistiques.
Note de bas de page/référence 
Mme Solano est experte en production laitière, confort et bien-être, chez Lactanet. Mme Halbach et M. Cook sont affiliés à l’école de médecine vétérinaire de l’University of Wisconsin-Madison. 
 Cet article a été adapté d’un article scientifique publié dans JDS Communications, vol. 3, Solano et al., « Milking time behavior of dairy cows in a free-flow automated milking system [Comportement des vaches laitières au moment de la traite dans un système de traite automatisée avec circulation libre] », 426-430, droits d’auteur Elsevier (2022). 

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Par Laura Solano, D.M.V., Ph. D.
Experte en production laitière – Confort et bien-être